Le Projet
Paiements pour Services Environnementaux Manche est un projet de coopération mené dans le cadre du programme Interreg VA France (Manche) Angleterre. Il s’agit d’un projet de 4 millions d’euro, avec le cofinancement du Fond Européen de Développement Régional à hauteur de 2,8 millions d’euro, sur la période 2017 à 2020 (45 mois). 14 partenaires sont associés pour un but commun : améliorer la qualité de l'eau par la mise en œuvre de Paiements pour Services Environnementaux économiquement durables à l'échelle de 6 bassins-versants pilotes en France et en Angleterre.
• Titre : « Channel Payment for Ecosystem » (Paiement pour Services Ecosystémiques Manche)
• Acronyme du projet : CPES
• Services Priorité du Programme : « Renforcer l'attractivité des territoires de l'Espace FMA »
• Objectif Spécifique du Programme : « 3.2 Améliorer et protéger les écosystèmes côtiers et ceux des eaux de transition »
• Objectif spécifique : Encourager les pratiques favorables sur l'utilisation des sols grâce à la mise en place des PES économiquement durables à l'échelle du bassin hydrographique.
• Numéro du projet : 120
• Nom de l'organisation Chef de File : Université de Chichester
• Durée du projet : du 06.07.2017 au 30.04.2021 (45 mois)
• Localisation des activités du projet : Morbihan (France), Seine Maritime (France), Cornouailles et les Îles de Scilly (Angleterre), Devon (Angleterre), Hampshire (Angleterre), West Sussex (Angleterre), Portsmouth (Angleterre)
Le projet Channel Payments for Ecosystem Services
Débuté en novembre 2017, le projet européen Channel Payments for Ecosystem Services - CPES (en français : Paiements pour Services Ecosystémiques Manche) a pour mission d'améliorer sensiblement la qualité de l’eau dans un certain nombre de rivières et de lacs situés dans le sud de l’Angleterre et le nord de la France. Pour cela, il vise à réduire les concentrations de nutriments en mettant en oeuvre six projets pilotes PSE (Paiement pour services écosystémiques) de chaque côté de la Manche.
60 à 70% des eaux entrant dans la Manche n’atteignent pas un Bon État Ecologique (BEE) pour cause de sédimentation,
faibles niveaux d'oxygène, excès de nutriments. 30-50% des masses d'eaux souterraines de France et d’Angleterre
ne sont pas aux normes de qualité chimique de la Directive Cadre sur l'Eau (DCE) en raison des nitrates.
L’intensification des pratiques agricoles dans les régions du sud de l’Angleterre et du nord-ouest de la France depuis les années 1970 s’est traduite par des apports d’azote et de phosphore aux sols des bassins-versants, en excès par rapport aux besoins des cultures. Le ruissellement, l’érosion, les transferts divers ont mené les nutriments vers les eaux de surface, conduisant à la dégradation de leur qualité. La manifestation la plus visible de cette dégradation est le phénomène d’eutrophisation, marqué sur le littoral marin par le développement de marées vertes, et au niveau des masses d’eau continentales par des efflorescences de cyanobactéries. Elle s'accompagne de pertes écologiques, économiques et culturelles-esthétiques.
Les gestionnaires d’eau potable sont confrontés de plus en plus souvent à des risques de dépassement de normes sanitaires et de qualité chimique dans de nombreuses sources souterraines et superficielles. La persistance de cette situation peut représenter un coût économique significatif pour les gestionnaires de l’eau, selon l’incidence sur la qualité : augmentation des coûts de traitement des eaux, abandon de captages, mise en place de nouvelles connexions, construction de nouvelles usines de traitement, adaptation des traitements à de nouvelles molécules, fermetures de sites touristiques, réduction des stocks de pêche, etc.).
En France, des estimations réalisées en 2012 ont montré que la substitution des captages pollués par les fortes
concentrations de nitrates pouvait représenter entre 24 et 60 million d’euros.
Les avantages perdus découlant de la perte de bon état écologique de ces zones pourraient
représenter entre 1113 et 2295 millions d'euros par an (ministère français de l'écologie, 2012).
Face à cette situation, la puissance publique, tant aux échelons européens que nationaux, a mis en place des réglementations et des mécanismes financiers visant à inciter les agriculteurs à modifier leurs pratiques. Appliquée de manière uniforme et basée sur le principe de la stricte compensation des surcoûts engendrés par ces modifications, les réglementations et mécanismes mis en place ont abouti à des résultats.
On note, par exemple en Bretagne, un début de baisse des concentrations de nitrates dans la plupart des cours d’eau.
En France, l’évaluation du premier cycle de la DCE montre des améliorations de l’état des masses d’eau
mais des défis importants restent à faire concernant les pollutions diffuses.
Cependant, cette stratégie s’essouffle face à une difficulté persistante à atteindre les objectifs initiaux assignés (à savoir, faire en sorte que les eaux littorales et continentales recouvrent un bon état écologique), un frein majeur étant que les politiques appliquées aujourd’hui ne permettent pas une internalisation complète des coûts environnementaux dans les coûts de production et les prix payés aux agriculteurs par les acheteurs.
Cet échec relatif conduit à réfléchir à la mise en place d’outils financiers plus performants et plus à même d’atteindre l’objectif de bon état écologique des écosystèmes aquatiques : prévenir les sources de pollution et protéger la ressource en eau et les services écosystémiques offerts. La DCE y joue un rôle important en s’intégrant aux stratégies nationales, ainsi que les Mesures Agro-Environnementales (MAE) issues de la Politique Agricole Commune (PAC) offrant des subventions aux agriculteurs pour des changements vers des pratiques plus respectueuses de l'environnement et des ressources en eau. Cependant, ces stratégies se montrent insuffisantes pour atteindre les objectifs de la DCE, leurs aides peu incitatives pour mobiliser les agriculteurs et leur gestion administrative et financière complexe. L'adaptation des pratiques agricoles permet d’améliorer la situation, mais les agriculteurs, dans un contexte de rentabilité limitée, ne sont pas suffisamment incités à changer.
La projet Interreg offre un cadre d’expérimentation unique pour tester un mécanisme financier innovant permettant de répondre aux enjeux de qualité des ressources en eau et de durabilité financière pour rendre plus effective la gestion des zones de captages d’eau potable sur le long terme. La mise en œuvre des PSE dans des bassins-versants différents permet une généralisation de l'application commerciale et durable du concept PSE dans de multiples zones d’application.
Les paiements pour services environnementaux
Parmi les mécanismes financiers innovants, les paiements pour services environnementaux (PSE) sont des démarches volontaires dans lesquelles les gestionnaires de terres sont rémunérés par des bénéficiaires de l'écosystème pour changer de pratiques. Par des incitations financières, ils encouragent à mettre en œuvre des méthodes agricoles plus efficientes de gestion des nutriments, telles que l’orientation des sillons, l’utilisation ciblée des engrais et la plantation d’arbres, qui contribuent à réduire sensiblement les niveaux de lessivage et d’infiltration des nutriments dans le réseau hydrographique. En parallèle, ils réduisent les pertes pour l’agriculteur liées au changement, à des niveaux au-delà de ceux inscrits dans les réglementations et politiques environnementales actuelles.
Les incitations des PSE sont financées à travers la mise en place d’un marché dans lequel les gestionnaires du foncier sont payés par les bénéficiaires de l'écosystème aquatique, qui bénéficient d’un approvisionnement en eau plus propre (ex : compagnies des eaux, établissements touristiques…).
Exemple : L’augmentation des coûts agricoles supplémentaires associée à la mise en oeuvre
de pratiques écologiques sera couverte par la réduction des coûts de pompage et l'augmentation du tourisme
Le PSE a la double spécificité théorique d’être plus flexible (meilleure adaptation aux spécificités locales) et de conduire à une plus grande internalisation des coûts environnementaux. Il pourrait donc être plus performant que les politiques actuellement mises en œuvre dans l’atteinte de l’objectif de bon état écologique.
Des projets antérieurs (WATER, DEFRA et Vittel) ont montré la viabilité des PSE mais n’ont pas testé leur durabilité commerciale. Le projet Interreg CPES - Channel Payment for Ecosystem Services ou Paiements pour Services Environnementaux Manche – a pour objectif de démontrer que les PSE sont plus performants et durables pour résoudre les problèmes de pollutions diffuses, en dépassant certaines difficultés rencontrées par les MAE comme par les expériences antérieures de PSE dans l’établissement de relations de confiance entre acheteurs et vendeurs (cadre commercial clair, rendement des investissements, relation entre le risque et la rémunération, côté acheteurs ; impact sur les accords contractuels, sécurité du revenu, implications fiscales, implications en matière d'assurance, côté vendeurs).
Il s’attache également à examiner comment mieux intégrer ces mécanismes dans le consortium des politiques et réglementations environnementales actuellement en vigueur à l’échelle européenne. Il compare également l’implantation de ces mécanismes dans deux pays soumis à des contraintes différentes en matière d’organisation des filières agricoles et relevant de traditions et de modes d’organisation différents du point des rôles respectifs des sphères publiques et privées en matière de gestion et de régulation environnementales. Le projet CPES vise enfin à évaluer en quoi et comment les scénarios et outils mis en place et testés localement pourront être étendus à l’ensemble des bassins-versants situés de part et d’autre de la Manche.
Une action commune pour des contextes différents
En s'appuyant sur les caractéristiques propres aux cas d'étude, les partenaires agissent pour créer des outils communs, qui ont pour but de faire émerger des mécanismes PSE réplicables à de nombreux sites. La diversité d'enjeux et de contextes est la force du projet CPES. Les actions du projets s'inscrivent dans 4 modules de travail définis avec leurs livrables : M - Gestion du projet ; T1 - Mise en oeuvre ; T2 - Politiques ; C - Communication
Un cadre d’analyse méthodologique commun a été mis en place pour permettre la comparaison entre études de cas et l’adaptation aux particularités de chaque territoire ; les phases actives sont les suivantes :
Le diagnostic
Cette phase permet d’asseoir les justifications économiques du PSE. Chaque étude de cas réunit l’ensemble des informations de référence quant à l’état de la qualité de l’eau, les informations, ainsi que celles issues des travaux antérieurs : caractéristiques des bassins hydrographiques, qualité de l'eau, fonction et valeur des services écosystémiques, impact environnemental et pressions subies dans le périmètre et potentiel socio-économiques relatif aux acteurs locaux (entreprises, propriétaires fonciers, agriculteurs, les compagnies des eaux, collectivités territoriales, organismes de tourisme). Elle se traduit par des études concernant l’analyse coût-bénéfice d’une situation comparative sans et avec PSE, l’évaluation économique des services rendus par les pratiques agricoles et l’analyse de l’efficacité des aides publiques actuelles à l’attention des agriculteurs.
Un suivi est effectué par les sites pendant et après le projet pour garantir la continuité de l’amélioration du mécanisme : amélioration de la qualité de l'eau, réduction du phénomène d'eutrophisation et diminution de la sédimentation, avantages financiers.
L’élaboration du mécanisme PSE
Dans cette phase, le système d’enchères est utilisé pour révéler la valeur du paiement le plus acceptable pour les agriculteurs. Son protocole et ses modalités de mise en œuvre participent au design du PSE, complétés par des ateliers participatifs sur la gouvernance des PSE. Au terme de cette phase, l’évaluation des besoins de financement et le montage financier propre au cas d’étude sont déterminés.
Un des livrables majeurs du projet est une méthode reproductible en comprenant la diversité géographique des bassins hydrographiques ainsi que la diversité culturelle, politique et juridique des deux pays. Tous les 6 mois, les partenaires se réunissent pour partager leurs expériences et leurs avancements individuels et développent ainsi une boîte à outils comportant des modèles d’études de cas basés sur les services écosystémiques, des instruments financiers en soutien aux PSE, des accords commerciaux, des modèles d’engagement pour clusters d’entreprises et des outils de communication, adaptés aux zones de captage et aux différents cadres juridiques, culturels et politiques français et anglais.
La phase de mise en œuvre du PSE
Elle recouvre tout le processus de concertation et de négociation avec les agriculteurs et les acteurs locaux. La mise en application des PSE permet, au terme du projet, l’évaluation de l’efficacité du mécanisme sur la qualité de la ressource, l’équité sociale et la gouvernance collective du bassin-versant.
Le PSEM prendra activement contact avec les parties prenantes (OFWAT, DG MARE, DG ENVIRO, DG AGRI, conseils régionaux français et Syndicats nationaux des agriculteurs notamment) pour produire une politique d’encadrement et de mise en œuvre des PSE comme modèles d'intervention politique pérennes à intégrer aux futurs projets. Les principaux résultats pourront influencer le développement des politiques à l’échelle de l'UE.
La diffusion des résultats
Les résultats des études de cas sont diffusés afin de promouvoir les avantages du système de PSE et d'encourager d’autres acteurs à intégrer le mécanisme. Dès les premières étapes du projet, la communication sert l’engagement des acheteurs et des vendeurs : sensibiliser, développer l'intérêt et impliquer pleinement ces acteurs dans les activités et encourager l’application des systèmes de manière durable sur le long terme.
La stratégie de diffusion du projet vise les acteurs concernés par le système de PSE : décideurs politiques, organisations internationales, agences sectorielles, fournisseurs de services publics, organisations support aux entreprises, institutions supérieures de recherche et d’éducation, associations, etc.
Les événements (conférences, séminaires, ateliers, rencontres…) et les publications (brochures, communiqués de presse, articles de conférences, articles dans des revues professionnelles) sont amplifiés par un site internet et des médias sociaux.
Six sites pilotes
Six territoires de bassins-versants participent au projet CPES. Retrouvez dans le détails leurs descriptifs et leurs actualités dans leur page dédiée :
- Lac Roadford & Estuaire Salcombe-Kingsbride, Gara et Slapton, Devon, Angleterre
-
Eau souterraine des prairies calcaires des South Downs, Hamphire & West Sussex, Angleterre
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Rivière Rother et son bassin-versant, West Sussex, Angleterre
- Bassin d'Alimentation et de Captage de Tremblay-Omonville, Normandie, France
- Sources de la Vigne, Normandie & Centre, France
- Lac au Duc et bassin-versant de l'Yvel-Hyvet, Bretagne, France
Cliquez ci-dessous pour afficher les courtes descriptions des cas-d'études
Les partenaires
11 partenaires sont directement liés au projet CPES et 3 sont associés dans les études de cas. Le partenariat comprend des organisations qui possèdent des niveaux complémentaires d’expertise et d’expérience transmanche concernant les différents aspects du cycle de vie de l'écosystème et des déploiements des PSE : compagnies des eaux, représentants des communautés agricoles, gestion de bassins-versants, analyse de la qualité de l'eau, recherche, gestion du changement, modélisation économique, communication et élaboration de politiques.
- University of Chichester (UK) - Chef de file et coordinateur du MT Gestion
- Syndicat Mixte du Grand Bassin de l’Oust (France) - Coordinateur du MT Communication
- South Downs National Park Authority (UK)
- Portsmouth Water (UK)
- Westcountry Rivers Trust (UK) - Coordinateur du MT Mise en oeuvre
- Centre National de la Recherche Scientifique (France)
- Institut National de la Recherche Agronomique (France)
- University of Rennes I (France)
- Southern Water Services (UK)
- Environment Agency (UK)
- Sara Hernandez Consulting (France) - Coordinateur du MT Politiques
- Syndicat d’Eau du Roumois et du Plateau de Neubourg (France)
- Eau de Paris (France)
- Agence de l’Eau Seine-Normandie (France)
Pour mieux les connaître, vous pouvez visiter la page Les Partenaires regroupant l'ensemble des descriptions détaillées. En complément, des partenaires agissent à l'échelle de chaque étude de cas : retrouvez-les sur les pages dédiées des Sites pilotes.
Le Programme Interreg France (Manche) Angleterre est un programme européen de coopération transfrontalière qui a pour objectif de financer des projets de coopération de grande qualité entre la France et l’Angleterre, dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Ces projets ont pour objectifs de trouver des solutions aux problématiques communes qui existent dans plusieurs pays.
Le Programme Interreg France (Manche) Angleterre est cofinancé par le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER).